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Mikael infirmier, sur la voie pour devenir médecin...

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Mikael nous avait fait l’honneur de répondre à nos questions il y a quelques années. Infirmier, il se lançait dans des études de médecine. De nombreux lecteurs nous demandent de ses nouvelles. En voici.

Tout d’abord merci à remede.org et à Idris de me faire l’honneur d’une nouvelle interview. Il faut croire que mon témoignage aura pu renseigner et aider un certain nombre de personnes puisque j’ai régulièrement été sollicité pour des questionnements et des demandes de conseils depuis la première interview, par des personnes désireuses de reprendre leurs études de médecine. C’est en cela que je trouve tout l’intérêt de livrer mon expérience.

Remede.org - D’abord, où en es-tu dans tes études ?

Mikael - Je suis entré en deuxième année de médecine à Nancy en septembre 2015, après avoir passé le concours de Paces. J’aurais pu bénéficier d’une passerelle. C’est désormais une voie importante d’intégration des étudiants en médecine pour 40 %, grâce à la réforme des études de santé. J’ai commencé médecine après 18 ans d’exercice en tant qu’infirmier, dont 12 ans en tant qu’infirmier-anesthésiste (IADE). Mais lorsque je suis sorti du bac en 1994, je ne m’étais jamais inscrit en médecine. Je voulais donc savoir si j’avais les capacités nécessaires avant de m’engager dans une reprise d’études difficiles et un cursus aussi long. Le concours était pour moi une façon de répondre à cette interrogation. Je viens de valider les derniers examens de cinquième année en juin 2020, je suis en stage d’été chez un médecin généraliste jusque fin septembre et je vais ensuite débuter la sixième année (D4).

Es-tu retourné à ton premier métier pendant la crise Covid, comment t’es-tu organisé ?

Au début de la crise sanitaire, les étudiants en médecine ont été sollicités pour renforcer les équipes du SAMU afin de répondre aux très nombreuses questions médicales que se posaient les appelants. Tout naturellement, une grande majorité de mes collègues et moi-même ont été volontaires pour prêter main-forte aux équipes. La région Grand Est a été très fortement impactée par ce virus et, très rapidement, ce sont les services de soins qui ont aussi été débordés. Nos stages d’externes ont été suspendus, il était en effet incohérent d’ajouter aux équipes (dont l’organisation était complètement remodelée) la charge de devoir nous former pour nos futures fonctions.
Je me sentais d’autant plus inutile, n’étant pas à l’hôpital, que je savais mes anciens collègues infirmier(e)s et infirmier(e)s-anesthésistes surchargés de travail. J’ai donc sollicité le Doyen pour lui demander l’autorisation de reprendre mes anciennes fonctions temporairement. Il a répondu par l’affirmative en m’adressant un message, par ailleurs, très touchant pour ce qui concernait mon engagement.

Comment as-tu vécu cette période de crise ?

J’ai vécu cette période de façon très intense, avec les mêmes préoccupations que tous les professionnels du terrain. Chacun essayait de faire de son mieux pour aider les patients, avec tout de même des inquiétudes pour sa propre santé et celle de nos proches. Tout ceci se faisait dans une organisation complètement modifiée et avec des procédures très lourdes et complexes.
Rapidement d’autres questions, pour ce qui concerne mes études sont aussi arrivées. Comment allions-nous pouvoir poursuivre notre cursus ? Dans quelles conditions ? Comment allions nous être évalués et selon quelles modalités ? Alors que certains d’entre nous étaient investis à l’hôpital, d’autres étudiants étaient confinés chez eux (sans que ce soit une critique à leur égard), avec la possibilité de progresser sur leurs apprentissages théoriques. Personnellement j’ai dû redoubler d’efforts quand la charge de travail hospitalière avait diminué et que j’ai pu me consacrer à nouveau à mon apprentissage. Cette période a donc été doublement éreintante !

Est-ce que tes études de médecine t’ont été utiles pendant cette période ?

Ma formation initiale m’a apporté certaines bases et certains réflexes. Le contact que je peux avoir avec les patients est, par exemple, bien plus facile, grâce à mon expérience du terrain. Ma maîtrise technique de certains gestes est aussi bien plus grande que mes collègues qui ont vraiment commencé à entrer en contact avec des patients en 4e année.
J’ai fait très attention à bien rester dans mon rôle d’infirmier-anesthésiste pendant toute ma période de reprise d’activité.
Cependant mes études de médecine m’ont aidé dans la compréhension fine des conséquences et des pathologies associées au coronavirus, dans le raisonnement clinique et dans bien d’autres domaines. En fait toutes les expériences m’aident de façon synergique !

As-tu pensé à arrêter ?

Non, jamais ! Enfin il y a bien des moments compliqués et de découragement surtout face à la difficulté de ces études. Mais ce ne sont que des périodes passagères et j’ai toujours su me relever avec l’appui de ma famille et de mes proches. Au tout début, ils me prenaient pour un fou ! « Tu vas vraiment repartir pour 9 ans minimum de formation à ton âge ? », j’ai actuellement 43 ans. Très rapidement cela s’est transformé pour eux en admiration de mon courage. Je ne m’estime pourtant pas courageux ! Je suis juste passionné et opiniâtre !

Tu as fait une pause dans tes études, pourquoi ? Est-ce que cela t’a été délétère ?

Le côté financier aura sans doute été le plus compliqué à gérer pour moi. J’ai continué à travailler à mi temps pendant toutes les premières années du cursus. J’ai en effet un fils qui a eu son bac en 2019 et qui est lui aussi étudiant ! Ma reconversion ne pouvait s’entendre qu’à condition de pouvoir assurer ses propres études, mais pour cela, il fallait pouvoir assurer le côté financier. J’ai redoublé ma troisième année, ce qui m’a permis de retravailler à temps plein pendant un an, comme infirmier-anesthésiste, dans le secteur privé. J’ai ainsi obtenu une prise en charge de formation continue, pour financer une partie de mon externat. Cette interruption ne m’a pas semblé délétère ; bien au contraire, elle m’a permis de me conforter dans mon désir de changer de fonction.

Comment abordes-tu la 6e année ?

La sixième année est une année très compliquée, qui demande un investissement complet et me fait assez peur. Nous allons être en stage toute l’année à mi temps. En parallèle nous avons un contrôle continu avec des examens toutes les semaines, pour revalider toutes les matières déjà abordées ces dernières années ainsi que de nouvelles matières à acquérir… En juin prochain, il y a aussi les épreuves classantes nationales (ECN) qui déterminent nos choix de spécialités et de lieu d’internat. Viendront ensuite, très rapidement, les responsabilités d’être prescripteur ce qui représente un gros stress. Pour l’instant je m’estime insuffisamment préparé et j’aurai bien voulu avoir plus de pratique clinique. C’est donc une année intense qui laisse peu de place pour la vie de famille ou pour toute autre chose. Encore une fois, je pense pouvoir me reposer sur le soutien sans faille de mes proches dans la gestion du quotidien et ce sera une aide précieuse.

Un projet plus précis pour la suite ? (Ville ? Type de pratique ? Spécialisation ?)

Je suis en couple et toute notre famille est sur le secteur. Nous avons construit une maison peu avant que je me décide à reprendre mes études. Je n’envisage donc pas de quitter la région pour faire mon internat.

Pendant mes études j’ai régulièrement travaillé comme infirmier-anesthésiste en remplacement dans un hôpital périphérique. Je ne remercierai jamais assez Chantal, la cadre IADE du bloc opératoire ainsi que tous les membres de l’équipe, qui m’ont beaucoup soutenu, à leurs manières, dans ma démarche de reconversion. Il semblerait tout naturel de me diriger vers une spécialité de médecin anesthésiste-réanimateur. La crise sanitaire récente a mis en lumière toutes les difficultés du monde de la santé et du secteur hospitalier que j’avais déjà ressenties bien avant et qui m’avaient poussé à reprendre la fac de médecine. J’ai la sensation qu’il n’y a pas d’intérêt pour moi à retourner dans ce milieu.

Par contre, j’ai aussi travaillé comme infirmier libéral et l’exercice me plaisait beaucoup. J’ai donc rapidement été convaincu que je pourrai avoir un rôle à jouer en tant que médecin généraliste. Je vis dans un petit village et, s’il est trop tôt, pour savoir où je vais m’installer exactement, je pense malgré tout que ce sera en campagne, proche de mon domicile.

Avec le recul, tu te lancerais toujours en médecine ?

Assurément oui ! Mon histoire personnelle fait que lorsque j’étais adolescent, alors que j’aurai dû être à la piscine municipale avec lui, mon meilleur ami s’est noyé, il était pourtant un excellent nageur, mais il a fait un malaise. J’ai beaucoup culpabilisé à cette époque et j’ai voulu savoir quoi faire si une personne avait un problème médical. J’ai donc voulu passer mon brevet de secourisme à la caserne de pompiers de la ville où j’ai grandi. J’y ai rencontré des personnes formidables, qui m’ont donné envie de devenir pompier volontaire. J’ai, dans ce cadre, fait la connaissance d’une interne en médecine qui m’a donné envie de travailler dans le domaine de la santé.
La médecine, dans toutes ses fonctions, est une passion pour moi, mais plus encore, c’est le désir d’être utile aux autres qui m’anime. J’avais véritablement le désir d’aller plus loin, d’apprendre plus, de maîtriser mieux pour être plus efficient et plus dévoué aux autres.

Toujours avec le recul que tu as pris, un conseil à donner à ceux qui se lancent dans la reprise d’étude ?

Hésitez pour envisager toutes les difficultés et pour savoir quelles sont vos motivations profondes. Réfléchissez bien aux modalités de réalisation, on sous-estime toujours les problèmes, mais si vous êtes toujours convaincus, foncez !
Si vous ne réussissez pas, dites-vous que ce sera peut-être pour mieux rebondir ensuite et qu’il vaut mieux vivre avec des remords que des regrets. La route est longue, semée d’embuches, mais je n’ai jamais été aussi épanoui. Si vous arrivez à votre but, quelle satisfaction, quel bonheur d’être cohérent, en accord avec ce que vous avez au fond de vous, de faire ce qui vous fait envie et d’avoir plus de plaisir professionnel que de contraintes.

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  • Idris Amrouche
  • Rédacteur remede.org
  • amrouche.idris@gmail.com
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