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ÉNONCÉ ET QUESTIONS

Une mère de famille découvre son fils âgé de 4 ans inanimé dans la salle de bains. A l’arrivée du SAMU, les services de secours constatent que la pièce est correctement ventilée et comporte un radiateur de chauffage électrique.
Interrogée, la mère signale avoir retrouvé un flacon vide d’ELUDRIL®, solution alcoolique pour bain de bouche que l’enfant aurait pu boire. A l’arrivée à l’hôpital, l’enfant présente un coma profond et calme. Il respire spontanément (rythme respiratoire 20 mouvements/min). Le pouls (72 battements/min), la pression artérielle (135/100 mm de Hg) et l’auscultation pulmonaire sont normaux. Il est en hypothermie (température corporelle 35,3°C). Son haleine sent fortement la menthe. L’enfant n’est pas diabétique et ne présente pas d’antécédents familiaux.
Un examen biologique est immédiatement demandé et donne les résultats suivants

SgA pH (à 37°C) : 7,21
SgA pO2 : 122 mmHg
SgA pCO2 : 15 mmHg
Pl sodium : 138 mmol/L
Pl potassium : 5,2 mmol/L
Pl chlorure : 98 mmol/L
Pl bicarbonate : 12 mmol/L
Pl calcium : 2,32 mmol/L
Pl glucose : 2,1 mmol/L
Pl urée : 4,6 mmol/L

L’osmolalité par mesure du delta cryoscopique est de 321 mOsm/kg d’eau.
Le bilan hématologique est normal.

QUESTION N°1 : Commenter les résultats biologiques et le tableau clinique.

RÉPONSE N°1 :
Les résultats biologiques font apparaître essentiellement une acidose métabolique et une hypoglycémie sévère.
-  Acidose métabolique :
Le pH sanguin montre une acidose marquée (valeur normale SgA pH 7,35-7,45). Il s’agit d’une acidose métabolique marquée par une baisse de la concentration de bicarbonates et une hyperventilation compensatrice (diminution pCO2 et augmentation pO2).
On constate une augmentation du trou anionique TA = (Na + K) - (Cl + bicarbonate total) = 33,2 mmol/L.
L’analyse du désordre acido-basique doit être complétée par le calcul du trou osmolaire, différence entre l’osmolalité mesurée (321 mOsm/kg d’eau) et l’osmolarité calculée = 2Na + urée + glycémie = 282,7 mmol/L. Le trou osmolaire = 38,3 est augmenté (>10), ce qui peut être lié à la présence d’une molécule exogène en forte concentration.
-  Hypoglycémie :
L’hypoglycémie est sévère (valeur normale 3,9 - 5,5 mmol/L). L’absence d’antécédents médicaux doit faire évoquer une cause toxique. Le tableau clinique montre une pression artérielle, un rythme cardiaque et une fréquence respiratoire qui sont dans les valeurs de normalité. Le coma profond et calme signe une dépression aggravée du système nerveux central. Par ailleurs, la victime présente un état d’hypothermie sévère qui signe une intoxication grave. L’hyperkaliémie observée est sûrement consécutive à l’acidose.

QUESTION N°2 : En vous appuyant sur le bilan biologique, les renseignements fournis par la mère et les signes cliniques, quel diagnostic pouvez-vous envisager dans ce contexte ?

RÉPONSE N°2 :
L’acidose métabolique avec élévation du trou anionique plasmatique et du trou osmolaire doit faire penser à une intoxication. L’enfant a probablement ingéré une quantité relativement importante de la solution de bain de bouche. Ce type de solution peut renfermer une concentration forte en alcool éthylique. Par ailleurs, le goût agréable et la coloration attractive constituent des facteurs de risque d’ingestion par les enfants. Cette hypothèse d’intoxication éthylique est confortée par les troubles marqués de la conscience, par l’hypoglycémie assez fréquemment rencontrée dans les intoxications éthyliques chez l’enfant et enfin par l’hypothermie fréquente et précoce chez l’enfant. L’absence d’haleine caractéristique de l’alcool éthylique est dans ce cas due à l’odeur masquante de menthe. Au cours d’une intoxication alcoolique aiguë, l’acidose métabolique susceptible d’apparaître résulte de l’accumulation d’acides cétoniques et/ou d’acide lactique.

QUESTION N°3 : Quel dosage sanguin permet de confirmer le diagnostic ?

RÉPONSE N°3 :
Dosage de l’éthanolémie.

QUESTION N°4 : Quel est le traitement préconisé dans ce type d’intoxication ?

RÉPONSE N°4 :
L’intoxication éthylique nécessite une hospitalisation et une surveillance médicale, en particulier chez un jeune enfant.
En raison de la rapidité d’absorption de l’éthanol, l’évacuation gastrique est généralement inefficace, sauf si elle est pratiquée très précocement.
Par ailleurs, le charbon activé n’agit pratiquement pas sur la résorption de l’éthanol.
En l’absence de traitement spécifique, l’intoxication aiguë alcoolique doit faire l’objet d’un traitement symptomatique comportant plusieurs aspects :
-  réchauffage progressif pour lutter contre l’hypothermie,
-  correction de l’hypoglycémie par perfusion de sérum glucosé à 20 ou 30 %,
-  prévention des troubles respiratoires (comme pour tout trouble de conscience important) par mise en position latérale de sécurité, oxygénothérapie et, si besoin, intubation et ventilation mécanique,
-  injection de thiamine (vitamine B1) 100 mg associée à une polyvitaminothérapie (B6, PP...) avant la perfusion de glucose,
-  épuration extrarénale (hémodialyse, dialyse péritonéale) dans les formes très graves.

QUESTION N°5 : Quelles sont les particularités de cette intoxication chez l’enfant par rapport à la même intoxication chez un adulte ?

RÉPONSE N°5
L’intoxication éthylique aiguë chez l’enfant peut être due à l’ingestion de boissons alcoolisées mais aussi de solutions diverses (dentaire, cosmétique, antiseptique...). L’hypoglycémie survient beaucoup plus fréquemment chez l’enfant que chez l’adulte. Elle n’est pas corrélée à l’éthanolémie mais serait en relation avec une inhibition de la néoglucogenèse hépatique. Elle peut entraîner coma et convulsions et sa prolongation peut laisser des séquelles. L’acidose métabolique est très fréquente. Elle est marquée chez l’enfant et corrélée à l’éthanolémie.


Mis en ligne le 27 février 2013

Sources :
Documents antérieurs à 2009 : fichiers circulants entre les étudiants en pharmacie. Source exacte de la correction inconnue (présumée émanant du CNCI).
Documents à partir de 2009 inclus : site web du CNCI.
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