Le problème était déjà venu sur le tapis avec certains modérateurs du forum remede. J’ai d’ailleurs entendu évoquer ce sujet il y a quelques jours à la radio, mais c’est ce soir en parcourant le forum remede que j’ai eu envie d’éclairer cette question [1].

Internet devient de plus en plus un média incontrôlable. Un texte publié sur un blog, une vidéo lâchée sur youtube et rien ne vous appartient plus. Les flux rss dispatchent le texte au quatre coin du web : il est copié, recopié, indexé, réindexé sans que son auteur initial puisse en garder le contrôle. La vidéo, comme l’image fixe, est multipliée, scindée, montée … tout échappe là aussi au premier diffuseur.

Finalement, il en va de même pour une identité. Participez à un forum, un annuaire de contacts comme celui de remede.org et vous ne serez plus jamais anonyme. Les sites web dans leurs versions successives sont méthodiquement indexés et archivés au travers de projets comme celui intitulé wayback machine. Une simple recherche dans google et voilà révélés le parcours et les pensées d’un internaute un peu actif.

Dans toutes ces situations, la tentative de machine arrière devient impossible à très court terme. Ce qui est lâché est lâché.

Beaucoup d’internaute n’ont pas conscience de cette situation. Surtout les plus jeunes d’entre eux.

En 5 ou 10 ans d’études médicales pour ce qui nous concerne, des conneries, nous en avons tous fait.
Mais aujourd’hui rien ne se passe sans qu’un caméscope ou un appareil photo numérique ne traîne dans un coin. Rien ne se fait ou presque sans que les images ainsi créées se mettent à circuler sur le web, le tout passant à la moulinette google et consorts.

Et un jour il faudra assumer. Parce que le premier recruteur venu ira taper votre nom dans un moteur de recherche avant de vous donner un boulot. Parce que le premier patient venu ira taper Dr Y sur google histoire de voir. Parce que peut être, dans quinze ans, votre fille utilisera elle aussi google …

Les possibilités de recoupements offerts par l’indexation de contenus numérique étant déjà tellement fortes, celui qui voudra finira toujours par retomber sur ce qu’il n’aurait pas dû. Et ne vous inquiétez pas, à moins d’être extrêmement méticuleux, ce n’est pas un pseudo qui vous protégera : au fil des années, vous vous démasquerez petit à petit, inévitablement.

Bref, il est très probable qu’Internet change aussi ce facteur là de la vie. Avant, pour se faire oublier quand on avait tripoté la petite voisine pas majeure au fond de sa campagne, il suffisait de déménager à 100 kilomètres. Aujourd’hui et demain, il faudra probablement pour une nouvelle âme assumer son passé numérique de la naissance à la mort.

Pas réjouissant comme vision, c’est certain. Peut-être excessive, j’en conviens. Mais tout de même, mieux vaut avoir celle-ci à l’esprit plutôt que d’imaginer que le web est un petit jardin privé où l’on peut se promener saoul, tout nu au milieu de ses quelques amis. Car au sens propre comme au figuré, c’est bien à cela qu’on assiste.

Certains le regretteront très fort un jour. Très très fort. C’est une certitude.

Dès maintenant réfléchissez donc si demain, dans 5 ans, 10 ans, 50 ans vous serez capable d’assumer votre comportement numérique d’aujourd’hui [2]

Bientôt il sera définitivement trop tard pour en changer.