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Carine étudiante en Roumanie : « Notre pratique départagera toujours les bons praticiens des moins bons »

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Carine est une jeune étudiante en chirurgie dentaire. Maîtresse de son destin, elle a dans son parcours vu des hauts et des bas, mais sa persévérance aura été récompensée. Carine est aujourd’hui étudiante en chirurgie dentaire. Elle se confie à remede.org, et nous explique ses déboires, son départ pour la Roumanie et son recul par rapport à un système français en pleine transformation.

Depuis quand et pourquoi as-tu voulu devenir dentiste ?

Il faut savoir que depuis toute petite, j’ai toujours fait face à des moqueries à cause de mes dents. Au début je m’imaginais pédiatre puis les années ont passé, et la chirurgie dentaire m’a attirée par son aspect pratique, qui commence assez tôt dans le cursus. Avec le recul, je crois que c’était le meilleur choix que j’ai fait dans toute ma vie. Et si je peux éviter à des petits enfants de subir les moqueries à l’école à cause d’un défaut génétique, alors c’est une jolie raison pour laquelle j’ai décidé de me diriger vers la chirurgie dentaire.

As-tu fait une Paces en France ? Comment l’as-tu vécu ?

J’ai fait plus précisément 2 Paces, toujours très motivée, j’ai beaucoup travaillé, j’ai beaucoup pris sur moi et je me suis découvert un tempérament que je ne connaissais pas... après ces deux années, on peut dire que j’ai été traumatisée sur le plan psychologique.

Que penses-tu du système de sélection français ?
Le système de sélection français est pour moi une chose injuste, et après avoir quitté le pays j’ai pu me rendre compte à quel point les étudiants sont délaissés. On passe notre temps, nous Français, à nous plaindre qu’il n’y a pas assez de médecins dans les campagnes, de spécialistes. Mais aucune mesure concrète n’est prise.

Sélectionner de futurs médecins sur un concours où il n’y a que des matières abstraites, et « inutiles » est pour moi une chose horrible. On laisse sur le tapis des étudiants compétents, qui sont capables de rester des heures à apprendre des choses dans les livres, sous prétexte qu’ils n’ont pas le niveau du concours. Pour valider ce concours, ce n’est même pas 10 de moyenne qu’il faut, c’est la meilleure note possible, ce système est inhumain. On laisse tellement d’étudiants comme ça dans la nature après un an, voire deux ans alors qu’ils ont bossé d’arrache-pied pour obtenir la porte d’entrée au métier de leur rêve... et on estime « qu’ils n’ont pas le niveau requis du concours ». Pour faire court, je déteste ce système de sélection que je trouve injuste.

Que penses-tu de la réforme de la Paces à venir avec ce système de passerelle ?
Cette réforme me fait doucement sourire, on nous parle de passerelles, de suppression du numerus clausus, mais en fait ce que l’on ne dit pas, c’est qu’au lieu de perdre une année ou deux, on va faire perdre aux étudiants 3 ans de leur vie. On leur fait croire qu’on supprime la sélection, alors que celle-ci va forcément revenir avant l’externat, à la fin de la troisième année. Alors pour moi c’est une fausse solution au problème.

Pour les passerelles, j’ai un avis assez négatif sur la question. On veut nous laisser croire que n’importe qui venant de n’importe quelle filière pourrait devenir médecin ? On oublie les personnes qui ont la vocation de faire ce métier. Pour moi, quelqu’un qui est très bon en maths aura plus de mal à faire des études de médecine, car il faut déjà savoir apprendre beaucoup de choses avant d’être capable de raisonner sur le diagnostic d’un patient. On veut faciliter l’accès à des études qui sont et seront toujours difficiles, et même si on manque de médecins, ce n’est pas en mettant « n’importe qui » que l’on pourra former de bons médecins.

Comment t’es-tu décidée de partir en Roumanie ? Comment l’a vécu ton entourage (amis, famille) ?
Il faut savoir que j’ai des origines roumaines, donc cette destination était pour moi la plus simple et la plus évidente. À vrai dire, j’ai tenté deux fois de rentrer en Roumanie sur dossier. Car oui, il y a toujours une sélection, mais cette fois on regarde le dossier scolaire dans la globalité. La première a échoué (après la deuxième Paces), et j’ai été très démotivée, je ne voulais plus entendre parler de médecine. Alors j’ai fait d’autres projets et je me suis dirigée en deuxième année de biologie. Heureusement mes parents ont été très présents, ils ont repris tout le dossier depuis le début. Grâce à eux, à leur patience et à leur persévérance, j’ai finalement représenté mon dossier l’année suivante. Et le 8 août 2017, ma vie s’est transformée, j’allais enfin obtenir ce que je souhaitais. Tout le monde était très heureux. Au moment du départ pour la rentrée en octobre, ça n’a pas été facile. Mais on savait que c’était pour mon avenir. Il faut savoir que le dossier est compliqué à monter, ça prend beaucoup de temps. Grâce à mon bac+2, j’ai réussi à rentrer dans cette école, il m’aura fallu beaucoup de patience.

À quelle fréquence rentres-tu en France ?
Je rentre en France à la période de Noël, une dizaine de jours, puisqu’en général je prends le temps de travailler mes examens avant, car à la rentrée on enchaîne avec un mois de session d’examen. En avril la famille vient me voir, mais ça dépend aussi de leur disponibilité. Et sinon, je rentre pendant les vacances d’été.

Dans quelle fac étudies-tu ? Peux-tu nous la décrire ?
J’étudie à Iași, dans le nord de la Roumanie à la frontière moldave. C’est une université réputée dans la région, où l’enseignement est de qualité. En effet, ils ont investi de l’argent pour rénover le centre dentaire où nous nous exerçons sur nos patients. Tous les sièges de dentisterie ont été changés récemment. Le système est un peu différent de ce que l’on trouve en France, puisque nous avons à notre disposition les box et les sièges. Mais c’est à nous de trouver nos patients, suivant ce que l’on a besoin de faire au niveau pratique. Dans les années supérieures, on étend notre champ de pratique. On a de grands amphithéâtres la plupart rénovés, et tout le matériel nécessaire à l’apprentissage. Les bâtiments sont très bien entretenus.

Peux-tu nous décrire la formation en Roumanie ? Quelle part y est donnée à la pratique ? Quelles sont les conditions de travail ?
En première année et en deuxième année, nous avons des matières qui restent théoriques et qui ne s’approchent pas vraiment de notre futur métier. En première année, on y étudie la biochimie, l’anatomie générale et l’anatomie de la tête et du cou, ou encore la biophysique, la génétique et la biologie cellulaire. Les matières sont ainsi très similaires à celles que l’on connaît en Paces. Cependant, ici nous avons des examens par palier : 10 %, 40 % et 50 %. Le 10 % est un test simple de connaissance, qui porte sur ce qui a été fait depuis le début de la matière ; ça peut être des QCM, des questions rédactionnelles, des exercices. Le 40 % est l’examen pratique : la plupart des matières sont associées à un oral devant le professeur, on traite d’un sujet tiré au sort et on parle de ce que l’on connaît du cours. On a toujours une liste avec tous les sujets traités pendant le semestre dans la matière. Donc on sait exactement quoi apprendre. Mais l’examen pratique peut aussi être un simple écrit plus difficile, comme des exercices similaires à ce que l’on a fait en TP. Enfin, le 50 %, c’est l’examen final sous forme exclusive de QCM. Pour valider chaque matière, il faut avoir la moyenne à tous les examens cités précédemment. Sinon on va aux rattrapages ou on passe à l’année suivante avec un système de dette.

En deuxième année, nous faisons beaucoup de médecine générale, nous allons dans les hôpitaux à la rencontre des patients. Nous apprenons l’examen clinique puis nous apprenons à poser des diagnostics. Nous étudions la sémiologie médicale, la microbiologie en rapport avec le domaine dentaire. On fait également beaucoup de prévention bucco-dentaire, de la morpho-pathologie et physiopathologie (ou on apprend à lire des ECG), ergonomie, etc.

À partir de la troisième année, on commence la pratique notamment en cariologie. On est capable à la fin de l’année de traiter des petites caries non profondes, puis d’anesthésier certaines parties du visage pour faire des actions sur des lésions plus profondes.

Les dentistes formés en Roumanie sont-ils moins bons que les Français ?

En Roumanie, il faut savoir que celui qui réussira vraiment sera celui qui travaillera en cours, car il est surtout indispensable de fournir un important travail personnel. En France les étudiants ont tout à leur disposition. Ici, c’est plus strict, celui qui travaille vraiment et qui se donne la peine de pratiquer le plus possible et non pas que pour les examens sera plus tard un très bon praticien. Malgré les connaissances théoriques, la pratique est la part la plus importante. Et au final, que ça soit en Roumanie ou en France, pour notre discipline technique, la pratique départagera toujours les bons praticiens des moins bons.

Comment vois-tu ton retour en France pour ta pratique ?

Je ne sais pas encore comment j’envisage les choses pour mon avenir. Je ne sais pas si je retournerai en France. Mais j’aimerais acquérir de l’expérience professionnelle avant de m’installer quelque part, pour apprendre davantage. Mais pour le moment je pense plutôt à me spécialiser plutôt que m’en tenir au statut de chirurgien-dentiste.

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  • Idris Amrouche
  • Rédacteur remede.org
  • amrouche.idris@gmail.com
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