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Anne Wernet (SNPHARE) : « Il faudra vraiment tirer des leçons de cette crise du Covid-19 »

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Les médecins anesthésistes sont en deuxième ligne derrière les urgentistes pour gérer la crise du Covid-19 à l’hôpital. Bénéficient-ils d’une procédure adéquate pour y faire face au sein de leur établissement ? Éléments de réponse de la présidente du SNPHARE, Anne Wernet.

Quelle est la préparation envisagée pour faire face à l’épidémie ?
Elle se précise de jour en jour, mais n’est pas du tout définie. Certains hôpitaux ont commencé à distribuer des procédures avec des phases 1, 2, 3, 4 selon la montée en puissance de l’épidémie. D’autres hôpitaux comme le nôtre sont en train de le préparer. Notre inquiétude porte sur les moyens humains et les équipements. En ce qui concerne la technique, les anesthésistes réanimateurs et les réanimateurs médicaux vont savoir faire. Les anesthésistes seront-ils assez nombreux, même en supprimant des blocs ? On ne peut pas encore le dire. Nous aurons le même problème sur les paramédicaux, car une infirmière en réa travaille pour 2,5 patients habituellement et avec la lourdeur des soins, les protections et l’hygiène nécessaires, cela va devenir très lourd à gérer. Est-ce qu’on aura un vivier suffisant d’infirmières ? Ce n’est pas certain. Quant aux lits, on est incapable de savoir combien on aura de malades. Des projections ont été réalisées en Ile-de-France, prévoyant un risque de sursaturation et de dépassements des capacités de lits. On navigue en vue et on est complètement dans l’inconnu. Nous pouvons tout à fait admettre qu’il s’agit d’une nouvelle épidémie et qu’il est compliqué de prévoir le nombre de patients ; en revanche, le fait qu’on puisse manquer de personnel et d’équipement dont des respirateurs artificiels et de lits est quand même la conséquence de ce qu’on dénonce depuis des années, à savoir on est en train de mettre l’hôpital à l’os.

Quelle est la situation par rapport au manque de personnel ?
À force de laisser partir des personnels et de fermer des lits, nous nous retrouvons dans une situation où nous n’avons plus de réserve. Je vous donne un exemple qui illustre parfaitement le brouillard dans lequel se trouvent le ministère de la Santé et la DGOS : lors des élections professionnelles de juillet dernier, ils ne sont pas parvenus à joindre tous les praticiens qui n’étaient pas titulaires, en l’absence de coordonnées et d’informations. Bref, le ministère s’est mis dans une situation de navigation à vue.

Comment faire pour rassurer les gens ?
Les personnes qui travaillent à l’hôpital public ont cette conviction de remplir une mission de service public. Et elles viendront d’elles-mêmes là où il y aura des besoins au bloc pour faire face à cette crise. Lorsqu’il y a eu dans la région (Perpignan) un accident de car avec des enfants, elles n’ont pas attendu d’être rappelées pour venir en renfort et en urgence. Il faudra vraiment tirer des leçons de cette crise.

Heureusement qu’on n’a pas encore complètement détruit l’hôpital public. C’est ce qu’il s’est passé en Italie où le système de santé n’arrive plus à répondre. Des collègues médecins italiens qui se sont installés en France il y a quelques années m’ont expliqué que ce qui se passe en France pour l’hôpital s’est déjà produit en Italie.

Souffrez-vous d’une pénurie de matériel de masques ou de gel comme en ville ?
Au sein du bloc opératoire, les masques et les gels hydroalcooliques sont partout présents. Je n’ai vu aucune mesure de restriction dans le but de compter les masques. Toutefois, il y a eu une surconsommation de gels hydroalcooliques et donc des vols y compris dans les hôpitaux.

Quid du nombre de personnels contaminés au sein de votre hôpital ?
Officiellement, il n’y en a pas. Il faut dire que l’on dépiste très peu de monde, seulement des personnes qui viennent de zones endémiques et qui ont des symptômes respiratoires ou bien des gens qui ont des symptômes respiratoires très graves et qu’on dépiste.

Les praticiens hospitaliers doivent-ils se faire dépister systématiquement ? Qu’en est-il du test sérologique qui permet de savoir si une personne est contaminée ou pas de manière certaine ?
La réponse est compliquée. Nous n’avons de toute façon pas les capacités de réaliser des dépistages systématiques. Le procédé repose sur la récupération de l’ADN du virus puis par son amplification. Cela prend du temps et de la place. Un collègue de Versailles m’a expliqué qu’on ne peut en faire que 20 tests à la fois pendant 4 à 5 heures, soit au final 80 par jours. Mais il est probable qu’il y aura un dépistage très important des soignants, plus que dans la population générale. Notre problème n’est pas tant que les soignants soient malades [même si l’on peut perdre 20 % du personnel en absentéisme], c’est surtout qu’ils risquent de contaminer un grand nombre de personnes. Même avec toutes les mesures de protection, en tant que soignants, nous ne sommes pas à l’abri des erreurs.

Comment faire alors ?
Un tri dans le dépistage va être réalisé. Le test sera réalisé sur les patients à formes graves, à risques. Les populations à risque, y compris les soignants, seront sans doute surdépistées. La solution passera sans doute par le confinement des patients avec des zones Covid et des zones "saines". Dans notre établissement, les patients Covid sans signe de gravité vont se retrouver dans notre service de maladies infectieuses, construit il y a une quinzaine d’années de façon séparée des autres services de réanimation de l’hôpital. Il est probable que dans les salles de réveil qui sont des dortoirs, on va les transformer pour prendre des patients en réanimation non-Covid. Au fur et à mesure, on sera amené à dévier de plus en plus et à arrêter les activités classiques.

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  • Arnaud Janin
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