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Dr Jean-Marc Benhaiem : L’hypnose médicale contribue au mieux-être du patient et du soignant

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Alors que l’hypnose fait couler beaucoup d’encre, Remede.org a rencontré le Dr Jean-Marc Benhaiem, éminent spécialiste du sujet à l’occasion d’un débat autour des « Fabuleux pouvoirs de l’hypnose », une enquête qui vient d’être publiée (éditions Arte-Belin)*. Praticien hospitalier aux Centres de traitement de la douleur de l’Hôpital Ambroise Paré et de l’Hôtel Dieu. Il a créé, en 2001, le premier diplôme universitaire d’hypnose médicale à la Pitié Salpêtrière, Paris VI dans le Service d’Anesthésie du Pr Pierre Coriat.


Pour quelles raisons vous êtes-vous engagé sur la voie de la médecine ?

J’ai très probablement été poussé par mes parents pour qui les médecins étaient le symbole de la réussite sociale, incarnant la connaissance et la culture. Ma sœur aussi a fait médecine mais, la pratique face au patient ne l’attirait pas, elle s’est vite recentrée vers la biologie et l’anapath. De mon côté, les études m’ont intéressé mais sans plus.

Je me suis installé en médecine générale mais très vite j’ai trouvé les limites de la médecine telle que je la pratiquais.
Soigner tel ou tel trouble par tel ou tel médicament ne me convenait pas. Les patients demandent de l’aide, une écoute et pas seulement une gélule. Et cela personne ne vous l’enseigne à la faculté de médecine. J’ai cherché d’autres réponses pour changer ma pratique et ma relation au patient.

Pourquoi vous tournez-vous ensuite vers l’hypnose ?

J’ai rencontré le Dr Léon Chertok qui m a formé à l’hypnose en Médecine dans ses consultations. Ce grand humaniste a contribué à réhabiliter l’hypnose tant décriée après les travaux de Freud et d’autres psychanalystes. Ensuite, j’ai fait de moins en moins de médecine interne et pratiqué l’hypnose sur mes patients. Dans un premier temps pour soulager les douleurs chroniques puis en traitement contre les addictions.

Les indications de l’hypnose n’ont pas de limites pour aider le patient. Mais elle n’agit pas comme un médicament elle ne soigne pas les maladies. Elle soigne le rapport d’une personne à ses symptômes et plus généralement ce qu’elle vit difficilement. C’est en cela que cette pratique m’intéresse car elle replace l’ humain au coeur du soin. L’hypnothérapie nous oblige à reconsidérer le soin, la physiopathologie et la clinique psychiatrique.

Vous créez ensuite le premier DU d’hypnose médicale en France , il en existe maintenant une quinzaine en France, comment explique-t’on cet engouement ?

Il me semblait que l’approche trop psychanalytique de l’hypnose n’était pas assez tournée « sur le corps » mais encore trop vers la psychée. Pourtant, c’était bien sur le corps que l’hypnose pouvait montrer ses « fabuleux pouvoirs ». Les lombalgies et les douleurs chroniques ont été mes premiers terrains de formation. Depuis 2001 , date de la création du DU à la Pitié Salpétrière, le regard des professionnels sur l’hypnose a bien changé.

Aujourd’hui, l’hypnose est rentrée à l’hôpital, son utilité pour soulager la souffrance n’a plus à être démontrée. Elle est utilisée aussi bien au bloc par les anesthésistes que dans les cabinets dentaires. De plus en plus de professionnels de santé sont formés dans les services hospitaliers. Au début nous avions 15 ou 20 personnes par promotion aujourd’hui, nous en formons 80 chaque année pour plus de 300 demandes. Et nous poursuivons notre démarche dans notre association de formation au perfectionnement et nous organisons également des stages individuels dans des consultations d’hypnose

François Roustang, autre personnage « rebelle » dans le monde de la psychanalyse et un de mes maîtres résume bien la situation :

« Il fut un temps où les médecins faisaient tout autre chose que de quantifier. Ils avaient un rôle social, une présence, une forte intuition et une implication personnelle. Si l’hypnose a tellement de succès aujourd’hui c’est parce que les médecins sentent que la médecine s’est déminéralisée, déshumanisée. Et l’hypnose vient combler ce manque. »
En retrouvant une relation de confiance entre le patient et le soignant, avec des mots, des gestes, une écoute, le patient appréhende mieux sa maladie, se sent mieux et l’effet bénéfique opère aussi sur le soignant.

Qui sont ces professionnels de santé formés à l’hypnose ?

Il n’y pas de profil type, tout clinicien est intéressé par l’hypnose. Nous avons toutes les spécialités, tous les âges. Les infirmiers, kinésithérapeutes, psychomotriciens sont également très demandeurs de formation. Nous sommes aussi submergés par les demandes ses sages-femmes depuis que l’Ordre nous a recommandé.
Certains internes demandent aussi à se former. Dans le cadre d’un programme à Paris VI les candidats à l’internat apprennent l’autohypnose pour maîtriser le stress du concours.

Peut-on pratiquer l’hypnose médicale sans être Médecin ?

Oui, on peut pratiquer l’hypnose médicale sans être docteur en médecine. Si cette pratique n’a pas de reconnaissance légale, elle est encadrée par ses pairs et un code éthique. Beaucoup de courants théoriques de l’hypnose existent et ne facilitent pas toujours le choix d’une formation ou d’un thérapeute. La Confédération francophone d’hypnose et de thérapie brèves (CFHTB) créée par le ministère de la Santé regroupe un certain nombre d’écoles qui respectent une charte éthique. Les règles de bonnes pratiques stipulent notamment « que le thérapeute doit délivrer uniquement des traitements relevant de sa compétence. La connaissance des seules techniques de l’hypnose n’est pas suffisante pour autoriser la pratique de soignant ».


Comment renforcer l’enseignement de l’hypnose auprès des étudiants des professions de santé ? Quel regard porte l’Académie sur cet enseignement et cette pratique ?

L’enseignement de la médecine en France est très formaté, très technique et basé sur la thérapeutique médicamenteuse. Lors des premières difficultés rencontrées avec des patients, les externes comme les internes sont fragilisés la formation n’est pas tournée vers l’humain. Si des cours d’éthique et de relation patient-soignant font une maigre apparition dans les amphis, ceux-ci ne sont guère suivis par les étudiants qui privilégient les matières du concours. L’hypnose n’est pas encore entrée à la fac mais quelques initiatives se développent. En 2013, l’ Académie dans son rapport sur les thérapies complémentaires reconnaissait que « les indications de l’hypnose les plus intéressantes semblent être la douleur liées aux gestes invasifs chez l’enfant et les adolescents et les effets secondaires des chimiothérapies anticancéreuses ». En 2015, l’Inserm publie des résultats limités mais encourageants et apportent pour la première fois la preuve d’efficacité de l’hypnose dans deux applications : l’hypnosédation et la prise en charge des colopathies fonctionnelles.

Un nouveau rapport sur l’hypnose devrait être publié par l’Académie nationale de médecine d’ici la fin de l’année, puisse-t’il convaincre de l’urgence d’enseigner cette pratique dans la formation initiale des professionnels de santé.


Quel conseil donnez-vous à un jeune qui veut « faire médecine » ?

Apprenez toutes les techniques mais ne perdez jamais de vue qu’en face vous avez un être humain, une personne et non pas simplement un organe ou une partie du corps.

Une anecdote particulière vous a t’elle plus profondément marqué dans votre carrière ?

Lorsque j’ai proposé une demande pour créer un DU à Paris 12, j’ai essuyé un refus sans appel. Dépité, découragé, je me tourne vers Pitié-Salpétrière sans aucune recommandation et là l’équipe accepte avec enthousiame mon projet.

Ironie du sort ou signe du destin, l’hypnose revenait sur son lieu de pratique historique alors qu’elle avait disparu depuis le départ du Pr. Jean- Martin Charcot.

BIO

Depuis 1996 Membre du Comité médical du Conseil d’État et du Ministère de la Justice, médecin agréé.
2001– à nos jours Directeur du Diplôme Universitaire d’Hypnose Médicale à Paris VI, Pitié-Salpêtrière, sous l’égide du Pr Pierre CORIAT.

Depuis 2011 Praticien attaché au Centre de Traitement de la Douleur – Hôtel Dieu

Depuis 1980 Praticien attaché en Médecine Interne (Pr Cl. Bétourné) puis au Centre de Traitement de la Douleur – Hôpital Ambroise Paré (92 Boulogne)

Depuis 1998 Création à Paris du Centre HYPNOSIS regroupant plusieurs thérapeutes pratiquant l’hypnose pour addictions, douleurs, phobies…

Livres :

-   L’hypnose qui soigne, éd. J. Lyon, 1994, 2006.
-   L’hypnose médicale, éd. Medline, 2004.
-   L’hypnose aujourd’hui, éd. Inpress, 2005.
-   Oubliez le tabac, éd. Albin Michel, 2006.
-   Enfin je maigris, 40 exercices d’autohypnose, éd. Albin Michel, 2009.
-   L’hypnose ou les Portes de la guérison, éd. Odile Jacob, 2012, Paris.
-   Le Guide de l’Hypnose, éd InPress, 2015.
-   Zen et Hypnose, 12 Principes d’équilibre pour vivre heureux, éd. La Martinière, 2016.

Pour en savoir plus

Betty Mamane, journaliste scientifique a mené une enquête sur l’hypnose.
Partie de sa première expérience d’hypnotisée, elle nous explique pourquoi cette pratique fascine et effraie à la fois.
Au fil de ces pages, de nombreux témoignages de soignants illustrent comment l’hypnose est entrée à l’hôpital et révolutionne la prise en charge des patients.
En interrogeant des spécialistes d’horizons très différents et en s’appuyant sur les apports des neurosciences, elle montre que l’hypnose est une thérapie d’avenir, un nouvel art de soigner et de vivre.

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  • Anne Marie DE RUBIANA
  • Rédactrice en chef de Remede.org
  • amderubiana@remede.org
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