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Travail de nuit : un prix à payer élevé pour la santé

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Dépassement du nombre de gardes, repos de sécurité non respecté, récup’ non accordées, révisions d’examens et écriture de thèse la nuit… Nombreux sont les étudiants en santé qui, du début à la fin de leur formation, sacrifieront un certain nombre de nuits de sommeil. Or, l’impact négatif du travail de nuit sur la santé est de mieux en mieux connu… Les conseils d’un spécialiste du sommeil au CNRS pour limiter les dégâts après une garde.

Le travail de nuit est une donnée fondamentale pour les étudiants en santé.
Entre les révisions nocturnes pour mettre les bouchés doubles avant les examens et les astreintes et gardes de nuit pour les internes, les étudiants en santé sont loin de toujours dormir la nuit… Une privation de sommeil pas toujours facile à gérer au quotidien, et qui peut avoir à long terme des conséquences sur la santé, si l’organisme n’a pas son quota de sommeil.

Plus d’un interne sur 3 dépasse le service normal de garde
Preuve que ces nuits de garde ne sont pas toujours bien vécues : 91% des jeunes médecins seraient partants pour qu’une nuit de garde compte pour 3 demi-journées de stage, selon un sondage réalisé par Jeunes Médecins.
Combien de gardes font en moyenne les internes ? Selon une enquête menée par l’AP-HP entre mai 2018 et mars 2019, la majorité (43,6%) ont deux à trois gardes par mois et 5,4% d’entre eux plus de 6 gardes par mois. Le repos de sécurité n’est systématiquement observé que pour 61,5% des internes. 22% des internes restent dans le service le lendemain d’une garde pour un staff ou une garde et 6% d’entre eux font une visite ou une autre activité le matin.
L’enquête de l’ISNAR-IMG sur le temps de travail des internes, réalisée au cours de l’été 2018, va dans le même sens : 36% des internes interrogés déclarent dépasser le service normal de garde et 56% d’entre eux n’ont pas perçu de compensation de leurs gardes supplémentaires. Par ailleurs, 26,4% d’entre eux se sont vus refuser leurs récups !

Temps de travail à l’hôpital : rappel de la réglementation
-  en cas de travail continu, la durée quotidienne ne peut excéder 9h pour les équipes de jour et 10h pour les équipes de nuit ;
-  par période de 7 jours, elle ne peut excéder 44 heures par semaine , ou 48h en comptabilisant les heures supplémentaires ;
-  le repos minimum est de 12h entre deux journées de travail
-  par période de 2 semaines, le repos minimum est de 4 jours, dont au moins 2 consécutifs et un dimanche ;
-  une pause de 20 minutes est prévue quand le temps de travail quotidien dépasse 6h consécutives ;
-  le tableau de service doit être porté à la connaissance de chaque agent 15 jours au moins avant son application ;
-  la durée des astreintes ne peut excéder 72h sur 15 jours, avec maximum un samedi, un dimanche et un jour férié par mois.

Impact sur la santé
Voici les effets décrits par le groupe « Chronobiologie et sommeil » de la Société française de recherche et médecine du sommeil (SFRMS), détaillés dans un article intitulé « Le travail posté et de nuit et ses conséquences sur la santé : état des lieux et recommandations »*, publié en novembre 2018 :
-  Effets sur la qualité du sommeil :
Le travail posté de nuit provoque une désynchronisation des rythmes circadiens, d’autant plus que les conditions ne sont pas adaptées au sommeil la journée : lumière du jour, température plus élevée, niveau de bruit plus élevé. Par ailleurs, les personnes travaillant régulièrement de nuit rapportent une réduction de leur temps de sommeil par 24 heures. Le risque de somnolence au cours du travail de nuit est plus élevé, avec les risques que cela comporte.
-  Effets sur les performances cognitives
Somnolence et insuffisance du sommeil récupérateur entraînent un ralentissement du temps de réaction et une augmentation du nombre d’erreurs.
-  Risque métabolique
Le travail de nuit/posté est associé à un risque probable d’obésité, de diabète de type 2 et de syndrome métabolique. Une privation de sommeil sur quelques jours est déjà associée à une prise de poids significative.
-  Risque cardio-vasculaire
La désynchronisation des rythmes circadiens entraîne une forte perturbation des rythmes de pression artérielle et de fréquence cardiaque, avec notamment une perturbation du système autonome cardiaque. De plus, la réduction du temps de sommeil est associée à une augmentation du risque d’hypertension artérielle et de mortalité cardio-vasculaires coronariennes et cérébrales.
-  Risques pendant la grossesse
Le travail en horaires atypiques présente un risque augmenté de fausses couches spontanées, d’accouchements prématurés et d’avoir un enfant de faible poids de naissance.
-  Risque de cancer du sein
Entre 2007 et 2016, 24 études épidémiologiques menées en Amérique du Nord, en Europe ou en Asie ont permis de réanalyser le risque de cancer du sein lié au travail de nuit. Au vu de ces études, l’effet du travail de nuit sur le cancer du sein est considéré comme probable par le groupe d’experts ANSES.
Par ailleurs, une méta-analyse publiée en janvier 2018 montre une augmentation de risque de 19% de développer un cancer pour les femmes qui travaillent la nuit. Deux explications sont avancées par cette équipe : les infirmières ont des contraintes de travail de nuit plus intenses que les autres groupes professionnels étudiées ; les infirmières subissent plus fréquemment les examens de dépistage que d’autres professions.

-Les autres cancers
Trop peu d’études ont analysé le lien entre travail de nuit et les cancers de l’ovaire, du poumon, de la prostate, du pancréas et les cancers colorectaux pour pouvoir conclure. Mais sur le plan physiopathologique, les effets cancérogènes des perturbations du rythme circadien sont très compréhensibles et le risque de cancer probable.

Les conseils de Jacques Taillard, ingénieur de recherche à l’unité CNRS « Sommeil, addiction et neuropsychiatrie », à Bordeaux :
-  Si vous pouvez aller vous reposer 5-10 minutes au cours de votre garde, n’hésitez pas. Même si vous ne dormez pas (ou avez l’impression de ne pas dormir), cela aura un effet bénéfique ;
-  Couchez-vous rapidement en sortant de garde ;
-  Portez des lunettes de soleil sur le trajet retour au domicile, pour faire croire à votre horloge biologique que c’est encore la nuit !
-  Evitez les cafés au cours des dernières heures de garde, pour pouvoir trouver le sommeil facilement en sortant ;
-  Attention à la baisse de vigilance si vous avez prévu de rentrer en voiture et/ou de vous occuper de vos enfants en sortant de votre garde ;
-  Prévoyez une étanchéité complète à la lumière dans votre chambre (volets occultants, rideaux épais) et des bouchons d’oreille pour vous isoler du bruit ambiant, forcément plus élevé de jour que de nuit ;
-  Eteignez votre téléphone ou mettez-le en mode avion car les sollicitations ne vont pas manquer en pleine journée ;
-  Dormez aussi longtemps que vous le pouvez dans la matinée, même si le sommeil sera moins récupérateur qu’une bonne nuit de sommeil ;
-  Si vous ne parvenez à dormir que 4 heures le matin, faites une sieste de 20 minutes avant 17 heures, pour compenser un peu mieux votre dette de sommeil
-  Evitez de prendre des produits excitants et/ou des anxiolytiques pour tenir le rythme.

Pour en savoir plus :
*D. Léger, Y. Esquirol, C. Gronfier, A. Metlaine et le Groupe consensus chronobiologie et sommeil de la Société française de recherche et médecine du sommeil (SFRMS), « Le travail posté et de nuit et ses conséquences sur la santé : état des lieux et recommandations ».
-  l’article sur le même sujet publié en avril 2018 par Remede.

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  • Sophie Cousin
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