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Stéphanie Rist, députée LREM : Je trouve scandaleux que certains internes travaillent plus de 60 heures par semaine !

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Après un internat en rhumatologie, c’est au sein du CHR d’Orléans que Stéphanie Rist commence à s’investir sur l’amélioration de l’accès aux soins, dans une région fortement déficitaire en médecins. Elle se lance en politique et copilote une mission sur la formation des professionnels de santé. Capacités d’accueil des facultés, développement des stages, mise en place des FST, temps de travail des internes, transfert de compétences… la co-rapporteure du projet de loi « Ma santé 2022 », députée LREM, répond aux questions de Remede.

-Pour quelles raisons avez-vous choisi de faire médecine ?
-  Lorsque j’avais environ 10 ans, j’avais vu un reportage sur les enfants cambodgiens blessés aux jambes après avoir sauté sur des mines. Je voulais aller réparer leurs jambes. Mes parents n’étaient pas du tout médecins et je pense que le prestige de la carrière médicale m’a aussi attirée. Au lycée, on m’avait beaucoup déconseillée de faire médecine. J’entendais beaucoup à l’époque : « Tu n’as pas de parents médecins, tu ne connais personne, tu ne vas pas réussir… » C’était il n’y a pas si longtemps !

-Quels souvenirs gardez-vous de vos études ?
-  J’ai eu ma P1 en deux fois. J’ai un souvenir de gâchis par rapport à mes copains qui avaient très envie de faire médecine et qui n’ont pas pu, à quelques places près… J’ai fait mes études à Necker, avec comme doyen le Pr Philippe Even, qui se voulait assez moderne et nous laissait assez libres de notre organisation. Par exemple, nous avions la possibilité d’être en stage à temps plein pendant l’externat et nous allions en amphi à tour de rôle récupérer les cours. Cela me plaisait beaucoup car je n’aimais pas apprendre dans les livres. Cependant, les années où j’y étais, Necker n’était pas classée dans les bonnes facultés et nous étions dans les derniers au concours de l’internat... Cet apprentissage sur le tas nous obligeait à nous confronter très vite aux malades. Très instructif mais aussi très stressant. Faire toutes ses « première fois » directement sur un malade, c’est vraiment très délicat. Heureusement, c’est en train de changer.

-Qu’avez-vous trouvé de particulièrement difficile ?
-  Lorsque j’étais interne, les premières gardes aux urgences n’étaient pas obligatoirement seniorisées. Je me revois avoir le Samu au téléphone et faire ce qu’on me disait de faire, avec ce sentiment de ne pas savoir et de prendre des risques pour le patient. J’ai le souvenir d’un vieux monsieur arrivé avec ses valises aux urgences. Il avait une mauvaise tête. On l’a allongé et là il a fait un arrêt cardiaque. J’ai appelé le Samu. J’étais seule avec les infirmières et heureusement qu’elles étaient là ! J’ai beaucoup été formée par les infirmières.

-Pourquoi la rhumatologie ?
-  J’avais fait un stage dans un service où le chef exerçait la spécialité de manière intelligente. J’hésitais avec la médecine interne, mais j’ai trouvé que la rhumatologie était plus dynamique : on doit bouger les patients, faire des infiltrations, etc… J’ai fait mon clinicat en médecine interne à Paris, puis je suis retournée comme PH en rhumatologie au CHR d’Orléans, dans un service où il y avait aussi beaucoup de médecine interne. Il n’y avait pas assez de personnel dans le service. Il a fallu faire revenir des internes, des assistants, etc… Assez rapidement, on m’a confié la responsabilité du service et en 2010, je suis devenue chef de pôle et vice-présidente de CME deux ans après.

-Quelles ont été les motivations à votre engagement politique ?
-  Occuper ces fonctions hospitalières dans une région avec d’importants problèmes de démographie médicale m’a sensibilisée à de nombreuses questions. J’ai essayé d’améliorer l’accès aux soins depuis l’intérieur de l’hôpital. Mais il y avait de moins en moins de médecins et de plus en plus de patients à soigner…J’ai voulu m’engager en politique parce que je n’arrivais pas à améliorer la situation pour les patients de ma région.

-Les doyens des facultés de santé s’inquiètent de leurs capacités d’accueil, dans le cadre de la suppression du numerus clausus. Comment vont faire les facultés pour absorber les inscriptions supplémentaires ?
-  La conférence des présidents d’universités a beaucoup participé à cette réforme de la première année. La plupart des doyens y sont favorables. Certains ont émis des avis réservés, pour plusieurs raisons : parce qu’ils ont peur de perdre leur hyper-sélectivité ; parce qu’ils jugent trop complexe de mener en même temps la réforme des premier et deuxième cycles. C’est pour cette raison que nous avons déposé avec Thomas Mesnier un amendement pour repousser d’un an la réforme du deuxième cycle. Les craintes des doyens sur les moyens ont été rassurées par le ministère. Les efforts pour augmenter le numerus clausus vont être répartis sur plusieurs facultés -pas seulement sur celles de santé. Et des discussions vont s’ouvrir sur les profils des enseignants et les taux d’encadrement. Qui peut enseigner ? Est-ce que les PH pourraient avoir des missions d’enseignement sur certains sujets encadrés par l’université ?

-La réforme des études médicales prévoit davantage de stages. Les internes pointent déjà aujourd’hui des terrains de stage en nombre insuffisant dans de nombreuses spécialités dont la psychiatrie par exemple. Qu’est-il prévu ?
-  Dans la loi, nous n’avons pas inscrit d’obligation de stage ambulatoire en zone sous-dotée car nous savons que cela ne peut se mettre en place que de façon progressive, avec une augmentation des effectifs de maîtres de stage. Il faut plus de stages vers l’ambulatoire mais aussi vers les centres hospitaliers non-universitaires, tout en faisant attention à ce que les étudiants soient bien encadrés. Les élus de l’ARS et de la CRSA auront un rôle à jouer pour que soient mieux prises en compte les situations démographiques territoriales. Ainsi, la fixation du nombre d’étudiants en deuxième année des études de santé se fera par les universités qui communiqueront leurs capacités de formation, suivie d’une validation par l’ARS, après consultation de la CRSA. Le nombre et le profil des étudiants reçus en deuxième année fera l’objet d’un rapport d’évaluation remis au parlement. Le pourcentage d’étudiants issus d’autres filières sera peut-être fixé par décret.

-Comment rassurer les internes qui s’inquiètent du retard dans la mise en place des FST qui doivent entrer en vigueur en novembre 2019 ?
-  Les capacités d’accueil seront connues début juin. Cette mesure aura un impact financier, puisqu’elle fait passer certaines spécialités de 3 à 4 ans. Il n’y aura pas de FST pour tout le monde, mais toutes les FST seront accessibles en formation continue après la validation du diplôme.

-Les internes sont contre la demande du Cnom d’augmenter le nombre de stages exigibles pour obtenir sa licence de remplacement. Que pouvez-vous leur répondre sur ce point ?
-  Les discussions sont en cours entre les étudiants, le ministère et le Cnom. Je n’arrive pas très bien à comprendre l’intérêt d’une telle demande, surtout dans une région comme la mienne (Centre), où il y a déjà d’importants problèmes démographiques ! D’autant plus qu’il n’y a aucun souci avec les remplacements tels qu’ils se déroulent actuellement.

-Le futur statut de « Docteur Junior », prévu dans la réforme, manque de clarté : quelle rémunération ? quel fonctionnement pour les gardes ?
-  Les internes devraient rester des étudiants tout au long de la phase 3. Mais là aussi, les discussions sont en cours et cela devrait être tranché au cours de l’été.
Une autonomie supplémentaire des internes est une bonne chose pour ceux qui le souhaitent, mais à condition d’être encadrés si besoin.

-Quelles pistes de solution pour un meilleur respect du temps de travail des internes à l’hôpital préconisez- vous ? Faut-il des sanctions dans les services concernés ?
-  Il y a une responsabilité administrative sur ce point et il faut faire appliquer la loi. Je trouve scandaleux que l’on fasse travailler certains internes 60 ou même 80 heures ! Il doit y avoir davantage de contrôles et d’évaluations et, si nécessaire, je suis favorable à des sanctions. Effectivement, des dépassements importants du temps de travail pourraient conduire au retrait des agréments de postes d’internes ou à des sanctions financières. On peut travailler beaucoup mais intelligemment. J’avais un chef de service qui disait : « si tu pars à 20h, c’est que tu es mal organisé. » C’est parfois vrai. Mais il est vrai aussi que, dans certains services mal organisés, le temps de travail est systématiquement dépassé. Ce n’est pas normal : l’interne est là pour apprendre.

-Comment accélérer les transferts de compétences entre professionnels de santé alors que certains syndicats de médecins s’y opposent ?
-  Quand j’ai travaillé avec les étudiants pour le projet Ma santé 2022, j’ai été très agréablement surprise de voir qu’ils avaient une culture complètement différente de celle de leurs aînés. On va réussir à développer l’interprofessionnalité grâce à eux ! Je crois beaucoup à la redéfinition du métier de médecin. Depuis les années cinquante, rien n’a changé. Les médecins ont autant de tâches à accomplir, avec en plus toutes les tâches administratives et celles liées au développement des nouvelles technologies. Dans le même temps, on a diminué le nombre de médecins. Dans ma région, après de fortes résistances au début, la délégation de tâches aux infirmiers et aux pharmaciens est devenue une évidence.

-Quels conseils donnez-vous aux lycéens qui veulent se lancer dans les études de santé dans les prochaines années, compte-tenu des réformes en cours  ?
-  Beaucoup de parents de lycéens qui entreront en médecine en 2020 avec la réforme me téléphonent affolés… Je leur conseille de s’inscrire dans la filière où ils sont excellents. Si vous êtes très fort en physique, l’idéal est de vous inscrire en faculté de sciences avec une mineure santé. Nous ne savons pas aujourd’hui quelles facultés en dehors de celles de sciences, vont proposer des mineures santé. Cela va sans doute prendre un peu plus de temps. Cela m’étonnerait que dès 2020 des facultés de droit ou d’histoire par exemple proposent des mineures santé. Si vous êtes très bon dans toutes les matières, vous pouvez vous inscrire au portail santé. Le pourcentage d’accès via le portail santé et via les autres filières devrait se répartir autour de 70%-30% ou 60%-40%.

Bio express
-  1998 : concours d’internat à la faculté de médecine de Paris-Necker ;
-  2003 : diplôme de docteur en médecine de la faculté de Tours ;
-  2003- 2017 : médecin rhumatologue au CHR d’Orléans ;
-  2008 : chef de service de rhumatologie du CHR d’Orléans ;
-  2010 : chef de pôle au CHR d’Orléans ;
-  juin 2017 : élue députée de la première circonscription du Loiret, sous l’étiquette « En Marche ! » ;
-  printemps 2018 : en charge du copilotage d’une mission sur la formation des professionnels de santé – Ma Santé 2022 ;
-  septembre 2018 : rejoint la commission des affaires sociales ;
-  février 2019 : nommée corapporteure de la loi Ma santé 2022.

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