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ÉNONCÉ ET QUESTIONS

Madame B. présente depuis 3 semaines des maux de tête violents et des nausées avec vomissements, essentiellement le matin au lever. Étant enceinte de 22 semaines, elle a consulté son médecin traitant qui a estimé que Madame B. était victime d’une gastro-entérite. En raison de sa grossesse, il lui a prescrit un traitement d’une semaine à base de trimébutine (DÉBRIDAT®) 1 comprimé avant les repas et de paracétamol.
Malgré le traitement, les symptômes matinaux de Madame B. ne disparaissent pas et ont même tendance à s’accentuer, mais, c’est surtout une perte de connaissance passagère, un matin au lever, qui l’amène à s’adresser au service des urgences.
À son arrivée à l’hôpital, sa tension artérielle est de 140/95 mm de Hg, sa fréquence cardiaque de 77 battements/min, sa fréquence respiratoire de 19 mouvements/min, sa température corporelle 36,9°C. L’examen oculaire initial est normal. L’examen du tracé électrocardiographique fait apparaître des troubles de la repolarisation (modification du segment ST).
Un bilan biologique demandé d’urgence, donne les résultats suivants :

Pl Sodium : 135 mmol/L
Pl Potassium : 4,4 mmol/L
Pl Urée : 4,3 mmol/L
Pl Glucose : 4,3 mmol/L
Pl Chlorure : 102 mmol/L
Pl CO2 TOTAL : 18 mmol/L
SgV Lactate : 3,5 mmol/L
SgA pH (à 37°C) : 7,30
SgA pCO2 : 37 mmHg
SgA pO2 : 84 mmHg
SgA Oxyhémoglobine/ hémoglobine totale (Sa02) : 0,82

QUESTION N°1 : Commenter le bilan biologique.

RÉPONSE N°1 : Les résultats biologiques font apparaître une acidose métabolique avec augmentation du trou anionique. L’acidose métabolique (SgA pH 7,30) est marquée par une baisse du pH et du taux du CO2 total (PI CO2 total : 18 mmol/L) mais sans perturbation de la pCO2 et de la pO2. On constate une augmentation du trou an ionique [TA = (Na+ + K+) - (Cl- + CO2 total) = 19,4 mmol/L). Il s’agit d’une acidose normochlorémique avec augmentation du taux de lactate (SgV Lactate 3,5 mmol/L) conséquence d’une hypoxie tissulaire. Les gaz du sang artériel montrent une diminution de la SaO2 tandis que la pO2 et la pCO2 sont normales.

QUESTION N°2 : Un dosage d’urgence de la carboxyhémoglobine (%HbCO) est demandé et révèle un taux de 26 %. Quelle conclusion en tirez-vous quant à la cause des symptômes observés ? Quel est le mécanisme d’action de l’agent causal des symptômes ?

RÉPONSE N°2 : Il s’agit d’une intoxication oxycarbonée sévère (% HbCO = 26%) correspondant à une intoxication aiguë dans laquelle on rencontre habituellement et graduellement des maux de tête, vomissements, vertiges, perte de connaissance et troubles cardiaques. La molécule de monoxyde de carbone possède une grande affinité pour le fer Fe2+ des hémoprotéines, en particulier de l’hémoglobine sanguine. Elle déplace la molécule d’oxygène (O2) de l’oxyhémoglobine (HbO2) et se fixe à sa place selon la réaction : HbO2 + CO HbCO + O2
L’affinité de l’hémoglobine humaine pour le CO étant environ 210 fois supérieure que pour l’02, il en résulte un blocage fonctionnel de l’hémoglobine qui n’est alors plus capable de fixer l’oxygène et de le distribuer aux tissus, d’où une hypoxie tissulaire à laquelle le cœur et le cerveau sont très sensibles.

QUESTION N°3 : Quelle est l’origine des troubles cardiovasculaires observés sur l’électrocardiogramme ? Quel(s) dosage(s) complémentaire(s) peut (peuvent) être demandé(s) pour confirmer cet effet toxique tissulaire ?

RÉPONSE N°3 : Le tracé de l’électrocardiogramme montre des troubles de la repolarisation de type ischémique en relation avec l’hypoxie myocardique. La souffrance myocardique peut être confirmée biologiquement par une élévation de la troponine, créatine kinase (CK) et des transaminases (aspartate aminotransférase ASAT surtout).

QUESTION N°4 : Quel est le principe de la méthode de mesure du pourcentage de HbCO utilisée en urgence à l’hôpital ?

RÉPONSE N°4 : L’évaluation directe du pourcentage de HbCO repose sur la dissociation des caractéristiques spectrales des différentes hémoglobines. L’HbO2 présente 2 bandes d’absorption dans le visible (540 et 576 nm) qui, après action d’un réducteur, sont réduites en une seule bande (bande de Stockes) absorbant à 556 nm alors que l’HbCO présente également 2 bandes d’absorption légèrement décalées (538 et 570 nm) mais non modifiées sous l’effet d’un réducteur. On réalise une mesure spectrophotométrique différentielle à différentes longueurs d’onde dans un appareil automatisé (CO-oxymètre) qui permet d’obtenir un résultat rapide et nécessite qu’un très faible volume sanguin.

QUESTION N°5 : Le fait que Madame B. soit enceinte constitue-t-il un facteur de risque spécifique ? Quelles sont les conséquences redoutées ?

RÉPONSE N°5 : Le CO diffuse à travers le placenta et le taux d’HbCO est toujours plus élevé chez le fœtus que chez la mère, l’affinité de l’hémoglobine fœtale pour le CO étant supérieure à celle de l’adulte. L’intoxication oxycarbonée de la femme enceinte pose un problème sévère. Il n’existe pas de parallélisme entre l’état clinique de la mère et l’intoxication fœtale. Le pronostic est difficile à faire et l’intoxication fœtomaternelle peut conduire à la mort du fœtus (avortement spontané), à la prématurité, à des séquelles neurologiques (retard psychomoteur, convulsions) et à des malformations (atrophie cérébrale, microcéphalie).

QUESTION N°6 : Quel traitement hospitalier doit être mis en oeuvre ? Justifier votre réponse en prenant en considération le cas particulier représenté par l’état de grossesse de Madame B.

RÉPONSE N°6 : Le traitement de l’intoxication oxycarbonée repose sur l’oxygénothérapie hyperbare (OHB) à 2 ou 3 atmosphères pendant 1 à 2 heures en caisson. L’OHB permet de réduire la durée d’élimination du CO sanguin et d’augmenter la quantité d’O2 dissoute dans le sang. L’OHB n’a pas d’effet délétère sur la grossesse et doit être réalisée au plus tôt chez la femme enceinte, quels que soient l’âge de la grossesse et la symptomatologie observée.
Parallèlement une surveillance étroite du système cardiovasculaire doit être pratiquée et un traitement symptomatique entrepris (ventilation contrôlée, remplissage par des solutés macromoléculaires, correction de l’acidose, administration de bêtamimétiques).

QUESTION N°7 : Quelle est la cause la plus fréquente d’intoxication oxycarbonée en France, vraisemblablement responsable des symptômes présentés par Madame B. ?

RÉPONSE N°7 : En milieu domestique (cas de Madame B.), la majorité des intoxications oxycarbonées a pour origine un appareil de chauffage défectueux. Les appareils de chauffage utilisant le gaz (chauffe-eau, chaudières...) sont le plus souvent en cause. Les accidents résultent d’une mauvaise évacuation des produits de combustion (conduit de cheminée obstrué), un défaut de ventilation dans la pièce où est installé l’appareil, un défaut d’entretien ou un problème de vétusté de l’appareil.


Mis en ligne le 25 janvier 2013 - mis à jour le 27 janvier 2013

Sources :
Documents antérieurs à 2009 : fichiers circulants entre les étudiants en pharmacie. Source exacte de la correction inconnue (présumée émanant du CNCI).
Documents à partir de 2009 inclus : site web du CNCI.
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